Missions de courte durée et fiscalité (les 183 jours)

Malgré ce que l’on peut penser, les aspects fiscaux dans le cadre de missions de courte durée sont les plus difficiles à appréhender. En effet, il est une règle connue de tous qui malheureusement est bien souvent mal interprétée : la règle des 183 jours.
On entend souvent dire nos clients ou des expatriés eux mêmes « J’ai séjourné moins de 183 jours à l’étranger, je ne dois donc pas payer d’impôt sur le revenu dans le pays ou j’ai travaillé »
Cette notion des 183 jours est bien réelle et précisée dans l’article 15 du modèle OCDE des Conventions Fiscales. En revanche, cette condition temporelle n’est qu’une des trois conditions cumulatives posées par cet article afin de déterminer si le résident d’un Etat contractant, exerçant une activité dans un autre Etat, n’est imposable que dans le premier Etat.
Il faut noter que si la question de la fiscalité se pose ici c’est bien parce que le salarié exerce une activité dans un Etat autre que celui de sa résidence.
Pour mieux comprendre, nous prendrons comme exemple un salarié Français, résident en France avec sa famille et qui part faire une mission en Belgique pendant 5 mois. Il part seul en laissant sa famille en France et revient tous les week-ends en France.
Nous prenons aussi comme hypothèse que sa mission est effectuée auprès d’une filiale du Groupe et que cette mission est effectuée pour le compte de cette filiale étrangère. Le salarié demeure payé par son employeur Français et reçoit son salaire en France.
L’analyse classique dans un exemple comme celui-ci est bien souvent de dire que le salarié n’a pas d’obligations fiscales en Belgique puisqu’il aura passé moins de 183 jours dans le pays.

Néanmoins nous ne saurons trop vous conseiller de faire une analyse plus complète.
La première règle de base est de déterminer la résidence fiscale du salarié afin de déterminer quel pays aura un droit d’imposition. En cas de conflit de résidence (les deux pays considèrent en droit interne que le concerné est résident du pays), il faut vérifier s’il y a une convention fiscale. Celle-ci fixe, par l’application de diverses conditions, la résidence fiscale dans l’un ou l’autre pays.
Mais, il est essentiel de rappeler que l’imposition des salaires n’est pas due uniquement du fait de la résidence fiscale dans un pays. Comme nous l’avons rappelé, l’exercice d’une activité dans un Etat peut déclencher une imposition sur le revenu.
Une fois la résidence fiscale définie on doit analyser le droit d’imposition du pays concerné. Dans la plupart des pays le contribuable considéré comme non-résident fiscal sera imposé sur les revenus de source du pays concerné.
Donc, à partir du moment où il y a exercice d’une activité en Belgique, il faut se poser la question de l’imposition des salaires perçus pour l’activité exercée localement.
Dans notre exemple, le salarié sera sans trop de difficultés considéré comme résident fiscal Français mais exerçant une activité en Belgique il faut vérifier la convention entre les deux pays et l’article fixant les conditions d’imposition des revenus d’activité salariale.
Dans la convention Franco-Belge c’est l’article 11 qui nous intéresse. Celui-ci stipule :
1. Sous réserve des dispositions des articles 9, 10 et 13 de la présente Convention, les traitements, salaires et autres rémunérations analogues ne sont imposables que dans l’Etat contractant sur le territoire duquel s’exerce l’activité personnelle source de ces revenus.
2. Par dérogation au paragraphe 1 ci-dessus :
a) Les traitements, salaires et autres rémunérations ne peuvent être imposés que dans l’Etat contractant dont le salarié est le résident, lorsque les trois conditions suivantes sont réunies :
1° le bénéficiaire séjourne temporairement dans l’autre Etat contractant pendant une ou plusieurs périodes n’excédant pas 183 jours au cours de l’année civile ;
2° sa rémunération pour l’activité exercée pendant ce séjour est supportée par un employeur établi dans le premier Etat ;
3° il n’exerce pas son activité à la charge d’un établissement stable ou d’une installation fixe de l’employeur, situé dans l’autre Etat.
…..
Dans le 1) la convention fixe la règle : les salaires « ne sont imposables que dans l’Etat contractant sur le territoire duquel s’exerce l’activité personnelle source de ces revenus. »
Donc en principe dans notre exemple, le salarié serait imposable en Belgique.
Mais le 2) vient tempérer ce principe : Les salaires peuvent être imposés dans l’Etat ou le concerné est résident fiscal si trois conditions sont remplies. Dans notre exemple, notre salarié ne sera imposé qu’en France (et pas en Belgique) si les 3 conditions suivantes sont remplies :
– Il doit séjourner en Belgique pendant une ou plusieurs périodes n’excédant pas 183 jours au cours de l’année civile. (Notre fameuse règle des 183 jours)
– Sa rémunération, versée pour son activité exercée en Belgique doit être supportée par son employeur Français
– Il n’exerce pas son activité à la charge d’un établissement stable ou d’une installation fixe de l’employeur, situé dans l’autre Etat
Ce sont donc ces deux dernières conditions qu’il faut également garder à l’esprit ! On peut donc séjourner moins de 183 jours dans un pays mais si la rémunération est supportée par une entreprise résidente du pays d’accueil, ou si la charge de l’activité est refacturée à un établissement stable du pays d’accueil, il y aura imposition dans le pays d’accueil.
Dans notre exemple, le salaire demeure payé par l’employeur Français ce qui à priori évite la deuxième condition, sauf si la société Française facture le charge de l’activité à la société Belge. Dans ce cas les conditions ne sont pas remplies et le salarié sera imposable en Belgique sur les revenus perçus pour son activité exercée en Belgique et ce peu importe le temps qu’il aura passé en Belgique.
L’analyse de ces trois conditions est assez complexe, que ce soit dans le décompte de jours « présence physique » ou dans la compréhension du support de la charge de l’activité.
Il est donc primordial, en cas de mobilité de courte durée dans un autre pays de procéder à une analyse précise des obligations fiscales du salarié et de l’entreprise.
Attention également aux mobilités vers des pays sans convention fiscale avec la France ! Dans ce cas ce n’est que le droit interne qui s’applique et le risque de double imposition est présent.
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